Il y a des montagnes dont le nom suffit à susciter l’admiration des cyclistes de course. Des montagnes dont on a directement des images et des histoires en tête et qui figurent sur la liste des choses à faire de très nombreux cyclistes. L’une d’entre elles est sans aucun doute le Mont Ventoux. Le géant de Provence avec son sommet dénudé caractéristique.
Pourquoi faire le mont Ventoux à Vélo?
Le Mont Ventoux était également en tête de liste pour moi, car c’est vraiment une montagne particulière, tant par son aspect que par les drames qui s’y sont déroulés. Enfin, cette montagne crée toujours de nouveaux héros : En effet, celui qui réussit à gravir la montagne d’un seul coup (au moins une fois) des trois côtés est admis dans le club des fous, les Cinglés du Mont Ventoux, avec certificat et plaque très officiels.
La route vers le Mont Ventoux
C’est avec un mélange de nervosité et d’anticipation que je me mets à rouler sous un ciel bleu éclatant. Je part un peu au sud de Carpentras, à environ 70 mètres d’altitude, et j’ai exactement 50 kilomètres à parcourir avant d’atteindre le sommet du Ventoux, à 1909 mètres au-dessus du niveau de la mer. Jusque-là, il n’y a en fait que de la montée, d’abord presque imperceptible, puis de plus en plus raide. Mais tout d’abord, je pédale assez tranquillement vers la montagne, sur des routes secondaires et à travers de petits villages. Le paysage est magnifique. Au bout d’une douzaine de kilomètres, je franchis une petite crête et la voilà qui se dresse devant moi, dans toute sa splendeur.
Une immense élévation avec beaucoup de verdure, dont seul le sommet semble presque blanc si blanc qu’il pourrait presque s’agir de neige. Un spectacle que l’on a déjà vu tant de fois à la télévision et en images. Mais en direct et avec la perspective de faire de l’escalade, c’est encore autre chose et tout de même assez impressionnant. Et même si nous savons que le sommet se trouve à environ 1800 mètres au-dessus de nous, il n’a pas l’air si haut que ça.
Les premiers panneaux annoncent Bédoin. Les choses sérieuses commencent donc.
Une montée très longue et très raide
J’arrive enfin enfin sur la montée principale. Celle-ci nous accueille directement avec de forts pourcentages de pente et cela ne va pas s’arrêter pendant les 10 kilomètres suivants. Car oui. Tout ce que l’on entend est vrai. La montée est assez implacable. Il n’y a pas de répit, pratiquement jamais en dessous de 8%, mais ça grimpe jusqu’à 13%. Mais d’une certaine manière, mon optique semble un peu déréglée, car cela n’a pas l’air si raide, c’est même plutôt inoffensif si l’on regarde la route qui serpente à l’ombre des arbres d’automne. C’est plutôt idyllique.
Mais les jambes et le compteur de vélo ne mentent pas. De plus, toutes les voitures qui arrivent en face sentent assez mauvais les freins chauds. Je pédale donc et après quelques kilomètres, j’aimerais bien trouver un bout de plat. Mais cela n’arrive pas. Vraiment pas. Même pas très brièvement. Ouf !
Chaque kilomètre jusqu’au sommet est indiqué par une pierre sur le bord de la route. Pourtant, je ne veux pas savoir à quel point un kilomètre passe lentement. Je commence à rêver de faire demi-tour. Ou de m’allonger sur le bord de la route et d’attendre que quelqu’un vienne me chercher.
Mais je veux dire : Je suis quand même au Mont Ventoux ! Ça fait vraiment un moment que j’en rêve. En plus, d’autres font ce truc trois fois de suite et je commence à me dégonfler dès la première montée ? Pas question. Continue, continue à pédaler. Et puis, le Chalet Reynard doit bien arriver un jour. Je ne sais pas encore exactement ce que c’est, mais la montée devrait être un peu plus agréable après. C’est une motivation suffisante.
Chalet Reynard
Quelques tours de manivelle, même pas ronds, plus tard, le Chalet Reynard apparaît devant moi. C’est un restaurant ! Un endroit cher etbondé, mais je veux dire : il y a du coca ! Et des gâteaux ! Et des sièges ! Il y a peu de meilleurs endroits au monde en ce moment.
Alors que je n’ai croisé qu’une poignée de cyclistes sur le trajet jusqu’ici, ici, ça grouille de cyclistes de course, de cyclistes électriques, de VTTistes. Les deux montées de Bédoin et de Sault se rejoignent ici, et celle de Sault semble être plus fréquentée. Ou alors j’étais à deux doigts de rattraper tout le monde.
Il reste encore six kilomètres jusqu’au sommet. À partir d’ici, je rentre dans le fameux désert de roches le « paysage lunaire » et à partir d’ici, le sommet apparaît toujours au bout de la route, alors qu’auparavant, les arbres cachaient toujours l’horizon. Tout cela me semble en quelque sorte follement familier, après tout, cela a vraiment l’air aussi lunaire qu’on le connaît. En même temps, cette route qui traverse ce paysage blanc et surréaliste est aussi très bizarre et irréelle.
Bien que la pente soit devenue un peu plus supportable depuis le Chalet Reynard, les jambes commencent à être lourdes. Et la perspective du dernier kilomètre escarpé me rend encore plus fatigué. Nous avons même de la chance, car nous sommes relativement épargnés par le fameux vent de face.
Passage devant le monument Tom Simpson
Le virage devient de plus en plus difficile, le sommet se rapproche de plus en plus. Mais il doit y avoir…. aaah, c’est là ! Le monument à Tom Simpson, à environ un kilomètre du sommet. Sous l’influence de l’alcool et de la drogue, il s’est effondré et est décédé ici pendant le Tour de France 1967. J’ai un peu la chair de poule quand je pense à ce qui s’est passé ici, si près du sommet. De nombreux cyclistes laissent ici quelque chose au monument, que ce soit une bouteille d’eau ou simplement une pierre du paysage aride.
Encore une fois, je reprends mon souffle et je me lance dans le sprint final. Encore un kilomètre. Mais le sprint final se transforme plutôt en course d’escargots. Sur la route, il est certes écrit « Attaquer ! – « Attaquer ! », mais – eh bien. Non. Après avoir passé le col des Tempêtes, une brèche qui doit son nom aux vents violents et aux intempéries, je monte vers la tour blanche au sommet. Sur le chemin, quelques paparazzis m’attendent pour me vendre leurs photos plus tard. Comme si je voulais des photos de moi dans cet état ! Les petites jambes me font mal. Il ne reste plus qu’un virage, mais il est très difficile à négocier. Ici, il y en a encore 15%.
Encore une fois, je suis descendu de la selle et… il ne me restait pas assez d’oxygène pour penser, car je tourne évidemment dans le mauvais sens et me retrouve un niveau en dessous du panneau du sommet. Zut ! De toute façon, je ne peux plus monter à vélo, alors je fait les derniers mètres à pied.
Le sommet du Mont Ventoux : C’est fait !
En revanche, une vague de soulagement me traverse maintenant. J’ai réussi. C’est incroyable. Le panneau Ventoux est là, âprement disputé par les alpinistes pour obtenir une photo – c’est à cela que doivent ressembler ces sites d’influenceurs branchés que tout le monde a dû poster sur Insta. Et derrière le panneau du sommet, on a droit gratuitement à une vue magnifique. Quelques nuages de beau temps empêchent la vue sur la mer promise, mais cela n’a aucune importance pour le moment. C’est tout simplement magnifique, même sans cela.
Aujourd’hui, j’ai réussi à gravir l’une des plus dures montées d’Europe. Et avec cette vue sur les collines de Provence, je me sens justement récompensé de mes efforts. Je peux maintenant confirmer que cette montagne est particulière. À bien des égards. Et que l’on peut vraiment s’y faire mal comme nous autres cyclistes aimons le faire.